lundi 26 février 2018

SNCF : une offensive contre l'ensemble du monde du travail

Contre les cheminots, Macron a choisi l’affrontement brutal. D’abord par l’ampleur de l’offensive, même si celle-ci n’est pas nouvelle.

Année après année, suppression de postes après suppression, les cheminots ont vu leurs conditions de travail se dégrader. Ils ont vu la sous-traitance et la précarité s’étendre et leur charge de travail augmenter, au nom de la compétitivité. Comme tous les autres travailleurs, ils ont aussi dû reculer sur leurs droits à la retraite. Mais Macron veut aller bien au-delà. En supprimant leur statut et en les obligeant à être transférés aux opérateurs privés sous peine de mutation ou de licenciement, Macron veut faire table rase de leurs droits.

Et il y a la méthode. En recourant aux ordonnances, comme il l’a fait pour casser le code du travail, Macron joue la provocation. En s’en prenant ainsi à une fraction du monde du travail, qui a la réputation de se mettre en grève plus facilement, il veut prouver à la bourgeoisie, d’un côté, et aux travailleurs, de l’autre, qu’il est capable de balayer toute résistance ouvrière.

Dans ce bras de fer, ce ne sont pas seulement les cheminots qui jouent gros, c’est aussi l’ensemble du monde du travail. Pour nous tous, salariés et usagers de la SNCF, l’enjeu ne se limite pas à la suppression de lignes secondaires et à l’augmentation des tarifs. C’est aussi et surtout une question de rapport de force politique entre le monde du travail et la bourgeoisie et son gouvernement.

La force des cheminots, leur nombre, leur rôle essentiel dans la société et leur combativité ont toujours été un facteur important de ce rapport de force global, une sorte d’arme de dissuasion contre les politiques anti-ouvrières.

En 1995, les cheminots avaient fait ravaler à Juppé non seulement sa réforme des régimes spéciaux de retraite mais aussi une bonne partie de son plan contre la Sécurité sociale. Le souvenir de cette défaite cuisante hante encore les politiciens.

Exactement comme Margaret Thatcher l’a fait en Grande-Bretagne avec les mineurs en 1984, Macron veut, au travers des cheminots, donner une leçon à l’ensemble de la classe ouvrière et dégager la voie pour de nouvelles attaques : la suppression de 120 000 postes dans la Fonction publique, le passage aux capitalistes de pans entiers des services de l’État et une nouvelle casse des retraites.

Macron veut sa guerre contre les cheminots. Il joue les fiers-à-bras et son arrogance s’exprime comme jamais. C’est ce que font tous les boxeurs quand ils montent sur le ring. Une fois que les coups partent, c’est une autre histoire. Juppé en 1995 ou même De Gaulle en 1968 ont fait l’expérience que, face à la force des travailleurs en grève, le pouvoir est forcé de reculer.

Mais pour se lancer dans le combat et le gagner, les cheminots ont besoin du soutien de l’ensemble des travailleurs. Celui-ci commence par tordre le cou à toutes les âneries sur les « privilèges » des cheminots. Être guichetier, manœuvre, chef de quai ou technicien n’a rien d’une sinécure, pas plus que de conduire des trains en 3x8, les week-ends, sans pouvoir rentrer dormir chez soi.

« Je ne peux pas avoir d'un côté des agriculteurs qui n'ont pas de retraite, et de l'autre avoir un statut cheminot et ne pas le changer », a déclaré Macron au Salon de l’agriculture. Le gouvernement met tous les problèmes de la SNCF sur le dos du statut des cheminots, et voilà qu’il serait aussi responsable de la situation des paysans les plus pauvres ! Toute cette démagogie n’a qu’un but : diviser les travailleurs.

Oui, en résistant, les cheminots ont conservé certains de leurs droits. Comme n’importe quels exploités, ils ont raison de se défendre contre la cupidité des futurs barons du rail.

Aujourd'hui, les cheminots n’ont d’autre choix que de se préparer à la grève. Et pour vaincre, elle devra durer le temps qu’il faut. Ce n’est une partie de plaisir pour personne, et sûrement pas pour les usagers. Mais les problèmes qu’une telle grève posera ne sont rien en comparaison des reculs qui nous attendent tous si Macron et la bourgeoisie ont les mains libres.

Il faut donc souhaiter que cette mobilisation soit la plus large et la plus forte possible. Il faut souhaiter que les cheminots se lancent dans le combat et qu’ils se battent avec la fierté de ceux qui n’ont pas volé leur pain.

Et il faut tout faire pour qu’ils ne restent pas seuls dans l’arène. Il faut que les cheminots reçoivent le soutien moral et actif de tous. Pour que le monde du travail inverse la vapeur contre le grand patronat, il faut que Macron subisse une défaite et ravale sa morgue anti-ouvrière.
 
Le 26 février 2018

lundi 19 février 2018

L'attaque contre les cheminots est une attaque contre tous les travailleurs

Transformation de la SNCF en société anonyme, fermeture des « petites lignes », ouverture à la concurrence, disparition du statut de cheminot et suppression de 5000 postes : le rapport Spinetta prépare la privatisation à marche forcée et la liquidation des droits des cheminots.

C’est une déclaration de guerre à laquelle a aussitôt répondu un appel de la CGT à riposter le 22 mars.

Les cheminots, comme tous les salariés qui sont attaqués, ont raison de se défendre. Alors que le gouvernement se vante de la reprise économique et du retour de la prospérité, aucun travailleur ne doit accepter de voir ses conditions de travail et de vie reculer. Aucun ne doit se résigner à servir de pion dans le casino capitaliste. Ni les cheminots, ni aucun autre travailleur.

Le statut des cheminots excite nombre de ministres et de commentateurs. Outre qu’il est largement mis à mal par le développement de la sous-traitance et la généralisation de la précarité à la SNCF, il ne fait sûrement pas des cheminots des privilégiés !

Les vrais privilégiés dans la société capitaliste, ce sont les Bernard Arnault et les Patrick Drahi, les actionnaires des entreprises du CAC 40 comme Veolia ou Vinci, qui vivent de l’exploitation de milliers de salariés et qui utilisent déjà la SNCF comme une machine à faire du cash. Les cheminots, quant à eux, tiennent juste à ce qui reste de leurs droits.

Au travers de cette attaque contre les cheminots, le gouvernement engage une épreuve de force contre tous les travailleurs. Macron veut en effet prouver à la bourgeoisie qu’il est capable de réussir ce que Juppé a raté : mettre au pas les cheminots, et, derrière eux, tous les travailleurs. Et s’il lance une telle attaque quelques semaines après avoir annoncé sa volonté de supprimer 120 000 postes dans la fonction publique, ce n’est pas un hasard.

Au-delà de l’attaque qu’elle constitue contre le monde du travail, l’ouverture à la concurrence et la privatisation du chemin de fer représentent un recul pour toute la société.

Les usagers de la SNCF mesurent au jour le jour les conséquences du sous-investissement dans le ferroviaire.

Ralentissements, suppressions de trains, retards et incidents en tout genre empoisonnent le quotidien de millions de passagers, quand il ne s’agit pas d’accidents plus graves.

Mais expliquer que le privé fera mieux que le public pour renouveler les infrastructures et le matériel vétustes, c’est se moquer du monde.

Si certains requins sont intéressés par l’ouverture à la concurrence, c’est que l’État leur sert tout sur un plateau, les infrastructures, le matériel, et même le personnel formé car ils hériteront automatiquement des cheminots de la SNCF. Ils n’auront plus qu’à choisir les lignes les plus rentables et à encaisser !

Le capital privé sévit depuis toujours dans le ferroviaire. Le réseau a été conçu pour répondre aux besoins patronaux et il a servi de vache à lait à de nombreux groupes capitalistes. Avec la dette de la SNCF, les banquiers ont aussi été invités à se servir sur la bête.

La SNCF se comporte elle-même depuis fort longtemps comme n’importe quelle entreprise privée. Les cheminots ont à s’opposer aux mêmes pressions à la productivité que les travailleurs dans les autres entreprises. Quant aux usagers, ils sont confrontés aux tarifs exorbitants lors des périodes de pointe et aux fermetures de lignes et suppressions de trains jugés insuffisamment rentables depuis déjà des années.

C’est cette logique que le gouvernement veut aujourd'hui pousser le plus loin possible en donnant un nouveau terrain de jeu au capital privé.

Au nom de la rentabilité, le gouvernement fait le choix d’évincer toujours plus de personnes de la vie sociale. C’est ce genre de logique qui nous amène lentement mais sûrement vers une société où on regarde l’âge du patient – ou son porte-monnaie – à l’hôpital, avant de lui poser une prothèse de hanche ; où la Sécurité sociale ne prend pas en charge des traitements rares et onéreux ; où l’on refuse l’accès à la faculté à tous les bacheliers.

Que ce soit pour les hôpitaux, les maisons de retraite ou le chemin de fer, faire passer la rentabilité et le profit au-dessus de tout, accepter le parasitisme du capital, est contraire aux intérêts des travailleurs comme des usagers.

Alors, dans le bras de fer qui s’engage avec le gouvernement, notre camp est celui des cheminots contre Macron et la bourgeoisie.

Le 19 février 2018

mardi 13 février 2018

S'élever contre le harcèlement et l'oppression des femmes

Le scandale Weinstein, du nom de ce producteur américain qui imposait un droit de cuissage aux actrices d’Hollywood, a été un électrochoc dans les milieux bourgeois.

Au travers des mouvements #MeToo et #BalanceTonPorc, des milliers de femmes, essentiellement des journalistes, des écrivaines et des cadres, fréquentant ce qui est censé être la fine fleur de la société, ont témoigné des comportements les plus glauques et avilissants.

Certaines trouvent désormais le courage de porter plainte pour viol ou harcèlement sexuel. Que ce soit aux États-Unis et dans les autres pays, la liste des personnalités mises en cause s’allonge donc de semaine en semaine.

En France, il y a ceux qui sont sous le coup d’une enquête comme le ministre du budget Darmanin, ceux qui sont mis en examen et emprisonnés comme le prédicateur Tariq Ramadan et ceux, comme Hulot, qui ne font pas l’objet de plainte actuelle mais qu’un journal a forcé à s’expliquer sur des relations passées.

Certains dénoncent un climat de suspicion généralisée et voient dans les réseaux sociaux un « tribunal révolutionnaire » intolérable. Mais aujourd'hui, en France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon, un viol a lieu toutes les sept minutes et plus de 20 % des femmes se disent victimes de harcèlement au travail. Alors, si la diffamation peut nuire à la carrière publique de quelques-uns, c’est d’abord le silence et l’omerta qui peuvent tuer.

La société recèle une telle épaisseur de crasse misogyne et de préjugés vis-à-vis des femmes, que cela ressort par tous ses pores, que ce soit sous les paillettes et les poses glamour des stars ou dans les hautes sphères politiques et même religieuses.

L’affaire Strauss-Kahn avait déjà montré, en 2011, qu’un directeur du FMI, ex-ministre dit socialiste et potentiel présidentiable, était aussi un prédateur sexuel. L’affaire Baupin avait dévoilé qu’un politicien écologiste, supposé partisan de l’égalité des sexes, harcelait ses propres camarades de parti.

Aucun milieu n’y échappe parce qu’il ne s’agit pas seulement d’éducation et de culture. C’est une question de préjugés et de pouvoir.

Que des actrices mondialement connues, des députées et des journalistes renommées expliquent ne pas avoir osé dénoncer leur agresseur de peur d’être mises au ban de leur profession et de voir leur carrière compromise, en dit long sur la force du pouvoir et de l’argent dans notre société. Et le gouvernement fait toujours mine de croire à l’existence de rapports égalitaires dans l’entreprise !

Les rapports de domination et de pouvoir structurent la société capitaliste. Et le plus déterminant est le rapport de classe, le rapport entre exploités et exploiteurs, celui qui met les salariés à la merci d’un chef, d’un responsable ou d’un patron. Et les femmes qui subissent de plein fouet les bas salaires, la précarité et le chômage en sont les premières victimes.

Et quand on est ouvrière ou simple employée, il faut se débrouiller sans relations dans les médias, dans la police ou la justice. Il faut se battre sans argent, avec le risque de perdre son gagne-pain.

Alors oui, le combat contre les violences sexuelles s’ajoute à ceux que les travailleurs ont à mener dans les entreprises. Il passe par la lutte contre les réflexions et les attitudes sexistes.

Le pire pour les femmes qui se battent contre leurs harceleurs est d’être en butte aux préjugés machistes de leurs camarades de travail. Il faut qu’elles puissent compter sur les hommes pour conquérir leur dignité au travail. De même, les travailleurs doivent pouvoir compter sur les femmes qui composent la moitié de la classe ouvrière pour mener le combat contre l’exploitation.

Il y a deux siècles, le socialiste Fourier expliquait déjà que, dans une société donnée, le degré d’émancipation des femmes est la mesure de l’émancipation générale. Depuis, bien des luttes se sont déroulées.

Alors que la bourgeoisie réservait l’action politique aux seuls mâles, les femmes se sont battues individuellement ou collectivement pour le droit de faire des études, de travailler, de voter et pour le droit à l’avortement. Ces combats ont contribué à faire évoluer les mentalités et il faut les poursuivre.

Mais ils ne suffisent pas à éradiquer les habitudes sexistes et à déraciner les préjugés séculaires parce que ceux-ci sont entretenus par les rapports d’exploitation inscrits dans l’organisation capitaliste.

C’est pourquoi le combat pour l’émancipation des femmes est indissociable de celui pour libérer la société du capitalisme. 

Le 12 février 2018


lundi 5 février 2018

Sélection, privatisation, rentabilité des services publics : c'est non !

Après les ordonnances travail, le gouvernement poursuit son œuvre de démolition avec, au programme, la réforme de la formation et de l’assurance chômage, celle du lycée et du baccalauréat, et la réforme de l’État.

Cette dernière s’annonce destructrice. Outre le développement des contrats précaires et la rémunération au mérite, le gouvernement projette en effet la disparition de services entiers et la mise en place comme dans le privé d’un plan massif de 120 000 suppressions d’emplois.

Ce n’est pas que le problème des fonctionnaires, cela nous concerne tous. D’abord parce qu’il s’agit d’un plan social qui fera grossir les rangs des chômeurs de 120 000 personnes alors que cinq millions de femmes et d’hommes se bousculent déjà à Pôle emploi. Ensuite parce que les services publics contribuent à nos conditions d'existence.

Ceux qui sont victimes des déserts médicaux, de la fermeture de maternités de proximité, de lignes de train ou de bureaux de poste, savent ce qu’il y a à perdre si l’on accepte de nouveaux reculs du service public. Et il n’y a qu’à comparer les prix des cliniques, des crèches et des maisons de retraite privées avec ceux du public pour en mesurer l’importance.

On l’a vu, la semaine dernière, avec la mobilisation des maisons de retraite : la présence de personnel en nombre et qualifié au chevet des anciens n’est pas du gaspillage, c’est une nécessité sociale. Le gouvernement peut répéter qu’il faut moderniser, mais aucun robot n’apportera le réconfort aux anciens, soignera les malades ou fera l’éducation des enfants.

Pour l’instant, le gouvernement n’ose pas annoncer la suppression de postes d’enseignants, de personnel hospitalier ou de gardiens de prison. Il évoque tout ce qui n’est pas « au cœur des missions des services publics » et qui pourrait basculer dans le privé. Pense-t-il aux cantines des écoles, des collèges et des lycées, par exemple ? À l’entretien des équipements publics ?

Les salariés des grands groupes savent ce que ce genre de sous-traitance signifie de dégradation. Car il est évident que le privé ne s’y lance que pour faire de l'argent sur le dos des usagers et des salariés du secteur. Les Sodexo et autres Orpéa ou Korian augmenteront les prix, réduiront les effectifs et intensifieront l’exploitation. Tout le monde y perdra.

Il faut refuser cette logique consistant à dire que tout doit devenir rentable et profitable. Dans cette société où l'argent est roi, l'éducation, la santé, les transports collectifs, les services postaux, les télécommunications, l'approvisionnement en eau et en énergie, devraient être des services publics. Ils ne doivent pas être gérés pour le profit, ni être soumis aux lois du marché, stupides et inhumaines. Ils doivent satisfaire les besoins collectifs.

C’est pour défendre cette perspective que des journées de protestation sont prévues cette semaine. Mardi dans l’éducation, contre la baisse des moyens et la sélection. Jeudi à la SNCF, contre la dégradation des conditions de travail et la privatisation programmée du chemin de fer.

Pour ne prendre que ce qui se passe dans l’éducation nationale, le ministre Blanquer fait beaucoup de mousse avec les CP à 12 élèves dans les zones d’éducation prioritaire. Progrès qui est d’ailleurs payé par les autres classes puisque cela s’est fait sans embauche. Mais, à côté de cela, il met en place une école de plus en plus sélective et élitiste.

Pour l’entrée dans le supérieur, il prétend avoir mis fin à l’injustice de la « loterie » en changeant la procédure et la plateforme informatique. Sauf que l’injustice n’était pas créée par un logiciel, elle l’était par le manque de places dans les facultés, et avec l’arrivée de 40 000 nouveaux bacheliers l’année prochaine, la situation ne peut que s’aggraver.

Le gouvernement ne veut pas mettre les moyens pour accueillir les nouvelles générations dans le supérieur, alors il organise l’éviction des jeunes des milieux populaires. Ils auront le baccalauréat en poche, mais ne pourront rien en faire, si ce n’est rejoindre la cohorte de jeunes chômeurs et précaires.

Ce qui se passe dans l’éducation, dans les Ehpad, les hôpitaux ou les transports, doit être l’affaire de tous. Dans l'offensive du gouvernement et de la bourgeoisie contre les classes populaires, il y a les attaques directes, les salaires qui baissent, les emplois supprimés, les congés rognés. Et il y a aussi ces remises en cause qui indiquent que la société, au lieu d'avancer, est en train de régresser. Et tout cela, simplement pour qu'une minorité de capitalistes puisse vivre en parasite sur la société. 
 
Le 5 février 2018