mardi 27 décembre 2022

Les attaques pleuvent, préparons la riposte de l’ensemble des travailleurs !

La grève des contrôleurs de la SNCF a sans doute gêné de nombreux voyageurs pendant le week-end de Noël et a donné lieu à un déchaînement anti grévistes du gouvernement et des journalistes. On ne les entend pas autant le reste de l’année, quand les retards et les suppressions de train dus aux économies réalisées par la direction de la SNCF entraînent la galère quotidienne pour des millions d’usagers. C’est que la gêne des usagers, durant ce week-end de fêtes comme le reste de l’année, est le cadet des soucis du gouvernement.

Face à des travailleurs en grève, salariés des raffineries de Total, éboueurs, travailleurs des transports ou de GRDF, le refrain de la « prise d’otage » est un réflexe chez ces dirigeants. Par contre, face à l’envolée du prix du caddie, aux factures d’électricité ou de gaz qui doublent ou triplent, il n’est pas question de prise d’otage, pas plus que quand le patronat fait pression sur les salaires et les conditions de travail ! Ils choisissent leur vocabulaire selon les intérêts de la classe capitaliste qu’ils servent.

Macron a saisi l’occasion pour dire qu’il faudrait interdire le droit de grève à certaines périodes, au nom du droit à la libre circulation. Comme si ce n’étaient pas les mesures prises par ce gouvernement en faveur du capital qui entravent la liberté de millions de travailleurs de circuler, de se chauffer, de se loger et de vivre dignement !

Les contrôleurs ont mille fois raison de se battre. Ils dénoncent non seulement l’aggravation de leurs conditions de travail, mais aussi des salaires insuffisants, malgré des primes qui ne compensent pas des salaires qui démarrent sous le Smic, sautent en cas d’absence et ne comptent pas pour la retraite. Même s’ils l’ont exprimé de manière catégorielle, le problème posé par les contrôleurs est celui de tous les travailleurs aujourd’hui : des salaires qui ne suffisent pas pour vivre.

L’autre aspect qui reste en travers de la gorge du gouvernement comme de la direction de la SNCF, c’est que les travailleurs sont passés par-dessus les directions syndicales. Les contrôleurs ont propagé la grève eux-mêmes, non seulement sur les réseaux, au travers d’un collectif national, mais aussi dans les discussions individuelles et collectives. C’est ce qui a conduit à la démonstration de force du premier week-end de décembre, où 80 % des contrôleurs étaient en grève, puis à la mobilisation du week-end de Noël.

Le ministre des transports, Clément Beaune, s’est insurgé contre ce collectif fait « pour contourner les syndicats ». Les commentateurs ont parlé d’irresponsabilité des grévistes, qu’ils imaginent forcément manipulés, car il est impensable pour eux que des travailleurs du rang, syndiqués ou non, puissent discuter de leurs intérêts et agir sans l’aval des directions syndicales. C’est pourtant bien toutes les grèves qui devraient être organisées et contrôlées par les travailleurs eux-mêmes.

Les syndicats se sont empressés de signer un accord avec la direction, qui promet une prime annuelle de 720 euros et la création de 200 emplois supplémentaires. Dans la foulée, ils ont levé le préavis de grève pour le week-end prochain. Quelle que soit la décision des contrôleurs sur la suite du mouvement, c’est bien leur grève qui a permis d’obtenir ce premier résultat.

Contre les grévistes, Véran a déclaré : « À Noël, on ne fait pas la grève, on fait la trêve ». Mais les attaques de son gouvernement et du grand patronat ne connaissent pas de trêve et leurs cadeaux pour l’année prochaine sont loin de nous faire rêver.

Ainsi, le gouvernement a choisi le 23 décembre pour annoncer une nouvelle mesure anti chômeurs : à partir du 1er février, la durée d’indemnisation pourra baisser de 40 % si le taux de chômage officiel ne dépasse pas les 6 %. C’est un moyen de plus de faire pression sur tous les travailleurs pour accepter n’importe quel emploi, à n’importe quelles conditions et pour n’importe quel salaire. S’y ajoutent la réforme des retraites et la volonté du gouvernement d’allonger la durée du travail, ce qui condamnerait nombre de travailleurs, jetés dehors bien avant 65 ans, aux petits boulots et à des pensions de misère. Sans oublier, encore et toujours, la valse des étiquettes et le pouvoir d’achat qui dégringole.

Des grèves éclatent ici et là sur les salaires. Pour faire reculer le patronat et le gouvernement, qui prennent nos conditions de vie en otage, il faudra une riposte de l’ensemble de la classe ouvrière. C’est en discutant entre travailleurs, en décidant nous-mêmes de nos actions et de notre façon de nous organiser et en contrôlant nos représentants que nous pourrons la bâtir.             

Nathalie Arthaud

Le 26 décembre 2022

 

lundi 19 décembre 2022

Vaulx-en-Velin : un drame et un avertissement

Dix morts dont quatre enfants, des habitants qui sautent dans le vide pour échapper aux flammes : le dramatique incendie d'un immeuble de Vaulx-en-Velin n'est pas un simple accident dû à la fatalité.

Cette copropriété d'un quartier pauvre, dans l'une des communes les plus pauvres de la banlieue lyonnaise, n'était pas entretenue, ses parties communes étaient transformées en décharge, les accès de secours scellés et son hall d'entrée servait de point de vente pour les dealers.

Un tel drame pourrait survenir dans des centaines de quartiers transformés en ghettos de pauvreté. Le chômage de masse, la misère qu'il engendre et l'absence de perspectives pour les jeunes y entraînent la dégradation de toute la vie sociale. Des immeubles se délabrent. Des trafics s'installent. Les transports se raréfient. Les écoles manquent de personnel et de moyens pour accueillir des enfants aux besoins plus grands qu'ailleurs. Les médecins ne s'y installent plus et les bureaux de poste sont fermés.

Les bas salaires, la précarité des emplois ou les retraites trop faibles empêchent ceux qui y sont relégués de se loger ailleurs. Ceux qui se sont endettés pour acheter leur appartement sont piégés, ne pouvant ni payer les rénovations ni revendre leur bien. Et combien, parce qu'ils sont immigrés, sont refusés dans d'autres quartiers ?

Le drame a déclenché une vague d'entraide efficace en quelques heures. Cet élan montre que la solidarité au sein des classes populaires n'est pas un vain mot. N'en déplaise aux réactionnaires qui dépeignent les quartiers populaires comme une jungle, cette entraide, entre voisins ou au sein des familles, est permanente. Elle seule permet de faire face aux conditions de vie qui se durcissent, aux fins de mois difficiles et aux défaillances des services publics utiles aux habitants.

Il n'y a rien de tel à attendre des politiciens au pouvoir. Pas moins de deux ministres, le président de Région, le député de la circonscription et d'autres encore, se sont déplacés au pied de l'immeuble. Ce défilé d'élus est abject car ils versent des larmes de crocodile sur le sort d'un quartier que toute leur politique passée et présente a transformé en ghetto.

Le ministre du logement Olivier Klein a vanté "les investissements faits pour le renouvellement urbain". Gouvernement après gouvernement, des dizaines de milliards d'euros ont été consacrés à la rénovation des villes. Cet argent public a enrichi une myriade d'entreprises du bâtiment pour des rénovations souvent douteuses. Il a parfois servi à chasser les pauvres vers des zones encore plus reléguées suite au remplacement des logements sociaux par des copropriétés.

En réalité, depuis que règne le capitalisme, une fraction importante des travailleurs n'a jamais pu se loger dignement. La cause est simple : le patronat refuse de verser des salaires suffisants pour payer un logement correct, et les politiques urbaines successives ne compensent pas.

Même quand l'habitat est rénové, les municipalités populaires sont étranglées, car l’État préfère arroser la bourgeoisie par centaines de milliards. Combien de municipalités ne peuvent plus financer les centres aérés ? Combien restreignent les horaires d'ouverture des médiathèques ? Combien ont dû fermer cet hiver des piscines ou des salles municipales à cause du prix de l'énergie ? Ces restrictions livrent à la rue les jeunes qui deviennent la proie des bandes.

Cultivant sa posture, Darmanin a affirmé que les effectifs de police avaient augmenté à Vaulx-en-Velin. La délinquance rend certes la vie infernale. Mais ni l'augmentation du nombre de policiers, surtout s'ils se comportent comme en territoire ennemi, ni l'armement des policiers municipaux n'enrayeront la montée de la violence, dont les causes sont d'abord sociales.

Pour changer leur sort, les exploités ne pourront compter que sur eux-mêmes. Face aux patrons qui exploitent leur travail, face aux gouvernements qui attaquent leurs conditions d'existence, autant que face aux bailleurs plein de mépris et même face aux trafiquants, ils constituent une force capable d'agir et de régler bien des problèmes.

Cette force, autrefois incarnée par les partis ouvriers, il faut la reconstruire et l'implanter dans les entreprises et les quartiers ouvriers. L'enjeu n'est pas seulement d'éviter de nouveaux drames mortels. L'objectif est de renverser cet ordre social insupportable dans lequel la fortune d'une poignée de riches bourgeois repose sur le maintien dans la misère de ceux qui produisent tout.

Nathalie ARTHAUD
 
Le 19 décembre 2022

 

mardi 13 décembre 2022

Non à la grande régression !

La guerre en Ukraine menace, à tout moment, de dégénérer en conflit plus large. L’envolée des prix, ahurissante pour l’énergie, force certaines entreprises à s’arrêter. Le pays risque d’être plongé dans le noir et, pour l’éviter, le gouvernement prépare des coupures d’électricité. Et quelle est la préoccupation de Macron ? Reculer l’âge de départ à la retraite !

Dans la pire des situations, même dépassés par les évènements, ceux qui nous gouvernent utiliseront leur dernier souffle pour s’attaquer aux travailleurs. C’est dans leurs gènes politiques. Pour eux, gouverner, c’est servir les intérêts de la bourgeoisie et donc imposer des sacrifices aux travailleurs. C’est d’autant plus vrai dans les périodes de crise où la guerre entre les capitalistes pour assurer leurs profits s'intensifie.

Alors oui, malgré les menaces qui pèsent sur la société et sur les classes populaires en particulier, Macron en rajoute. Après avoir réduit les indemnités chômage, il veut sabrer dans les droits à la retraite.

Macron s’est encore donné quelques semaines pour préciser son projet de loi. Mais celui-ci sera présenté courant janvier. Il y aura ensuite quelques semaines de cinéma où l’opposition s’agitera à l’Assemblée. Et si nécessaire, le coup de sifflet final sera donné par le 49.3. Tout cela pour une entrée en vigueur de la réforme à l’été 2023.

Seule l’intervention des travailleurs peut empêcher cette attaque au pas de charge. Pour l’instant, l’opposition massive à ce recul n’est mesurée qu’au travers des sondages. Eh bien, il va falloir l’exprimer dans les entreprises et dans la rue au travers de grèves et de manifestations !

Pour bien des travailleurs, la priorité est de réussir à se chauffer et se nourrir correctement malgré l’envolée des prix. Cela alimente, dans toutes les entreprises, un mécontentement sur les salaires. Il faut le faire entendre et le transformer en un coup de colère général contre la politique antiouvrière du gouvernement et du grand patronat.

La défense de notre pouvoir d’achat et de nos retraites constitue un seul et même front de combat. C’est parce que les capitalistes n’augmentent pas les salaires de base, et font, ici et là, diversion avec des primes, que les caisses de retraite ne se remplissent pas.

Si les femmes étaient payées autant que les hommes, cela ferait rentrer des milliards dans les caisses de retraite. Et si les plus de 50 ans étaient salariés, plutôt qu’écartés par les entreprises, il n’y aurait pas de déficit.

Rien n’oblige le gouvernement à reculer l’âge de la retraite à 65 ans. Le déficit annoncé des caisses de retraite, 12 milliards en moyenne par an dans les prochaines années, serait facile à combler.

12 milliards, ce sont les profits que TotalEnergies a réalisés en six mois. Cela correspond à un petit dixième des profits réalisés par les entreprises du CAC 40 en 2022. Et c’est 6,5 % de la fortune de Bernard Arnault, estimée, cette semaine, à 185 milliards de dollars. Alors, la bourgeoisie a largement de quoi payer les retraites !

Et ce serait la moindre des choses ! La classe capitaliste s’enrichit par l’exploitation des travailleurs pendant toute leur vie : cela devrait être à elle de payer intégralement leurs retraites, et non à d’autres salariés, par leurs cotisations, comme c’est le cas aujourd’hui au travers du système par répartition.

Nous pouvons sauver nos retraites, à condition de nous battre contre le gouvernement, dévoué corps et âme à la bourgeoisie, et contre l’ordre social capitaliste.

Un pays comme la France n’a jamais eu autant de possibilités pour soigner, nourrir, éduquer, transporter la population, et nous voyons nos conditions de vie reculer dans tous ces domaines.

Oh, pour les plus riches, la vie est douce et prospère. Ils n’ont jamais de problème d’emploi, de salaire ou de retraite : sans rien faire de leurs dix doigts, ils touchent le pactole en jonglant avec leurs capitaux. Cela leur donne le pouvoir d’occuper tous les postes de commandement dans les entreprises comme dans les institutions.

Où nous mène la domination de cette grande bourgeoisie ? À la régression générale pour l’écrasante majorité des travailleurs. Le plus grave est qu’en imposant son système de concurrence et sa guerre économique permanente, elle nous conduit aussi à la guerre tout court.

Alors, les travailleurs doivent affirmer leurs revendications et se battre avec la conviction d’avoir tout à gagner à contester cet ordre social.

Nous ne sommes pas condamnés à la domination de la bourgeoisie et de ses politiciens. Toute la production de richesses dépend de nous, il dépend aussi de nous de changer la société pour mettre un coup d’arrêt à son évolution catastrophique et guerrière.            

Nathalie Arthaud

Le 11 décembre 2022

lundi 5 décembre 2022

Crise énergétique : le gouvernement veut nous faire marcher au pas

Le gouvernement l’a annoncé : si nécessaire, cet hiver, il coupera l’électricité deux heures le matin ou le
soir. Cela pourra concerner jusqu’à quatre millions de personnes. Y échapperont, nous dit-on, hôpitaux, pompiers, commissariats et entreprises dites sensibles. En revanche, les autres entreprises, les écoles, les transports et le téléphone seraient concernés.  

La menace est-elle réelle ? Est-ce un coup de pression gouvernemental pour forcer la population à baisser sa consommation ? L’un n’empêche pas l’autre.

En tout cas, le message politique est clair : si vous ne faites pas assez d’efforts, si vous ne réduisez pas votre consommation d’électricité et ne baissez pas votre chauffage à 19°, eh bien, vous n’aurez plus le choix, on vous coupera le courant ! Ça s’appelle mener la population à la trique.

Ministres et journalistes aux ordres le répètent en boucle : au signal orange d’EcoWatt, il faut moins consommer. Et à vous d’obéir !

Si vous ne le faites pas, vous serez plongés dans le noir et le froid, sans téléphone et avec vos enfants sur les bras, car les écoles seront, elles aussi, fermées. En espérant que vous ne serez pas coincés dans un ascenseur, ou dans un méga-bouchon car il n’y aura plus de feux de circulation…

Comme lors de la crise sanitaire, il y a deux ans et demi, le gouvernement appelle à la mobilisation. Et si nous ne sommes pas volontaires et ne nous imposons pas, nous-mêmes, les sacrifices nécessaires, ce sera la contrainte et l’autoritarisme.

Lors du Covid, il fallait obtempérer sans rechigner aux ordres de confinement aussi contradictoires qu’absurdes : ne pas sortir de chez soi le week-end, mais aller travailler la semaine, par exemple. Tous ceux qui ont écopé d’une amende parce qu’ils promenaient leur chien à plus d’un kilomètre de chez eux en savent quelque chose. Quant aux travailleurs de la santé qui ont perdu leur gagne-pain parce qu’ils n’étaient pas vaccinés, ils continuent de payer cette politique autoritaire aujourd'hui.

Malgré l’incurie et l’aberration de leur politique sanitaire, le gouvernement et les préfets sont très satisfaits de l’expérience de confinement, car l’essentiel pour eux était que la population obéisse sans se révolter.

C’est le fond de toute leur politique : que les classes populaires obéissent à leurs décisions au doigt et à l’œil. Alors, ils nous diront bientôt combien faire de lessives par semaine et à quelle heure. Ils nous autoriseront ou non à nous servir du four ou à nous chauffer un peu plus, etc…

Ce ne sont pas les inquiétudes ou les intérêts des petites gens qui guideront le gouvernement pour décider des coupures d’électricité, c’est la continuité des affaires.

La bourgeoisie, à la tête des grandes entreprises, est déjà en train de plaider sa cause auprès des préfets, voire des ministres, et la liste des entreprises exemptées de l’effort national s’allonge. Parions que les grandes entreprises les plus consommatrices d’électricité seront protégées pour continuer à produire leurs profits !

Les classes populaires, les travailleurs, les petites gens, eux, n’ont jamais leur mot à dire. Ils sont les premiers touchés par la crise énergétique car c’est d’abord sur eux que pèse l’explosion du prix de l’énergie. Et en plus de cela, les leçons de morale, les appels au civisme et aux sacrifices, sont encore pour eux ! Pendant ce temps, les plus riches feront tourner plein pot des groupes électrogènes pour alimenter leurs palaces et disposer de tout leur confort habituel.

Pour une fois, le gouvernement peut dire qu’il planifie et organise, oui ! Il n’est pas capable de planifier la production d’électricité pour répondre aux besoins de la population, alors il planifie les coupures, la pénurie et le rationnement.

Lors de la crise sanitaire, il manquait masques, blouses et gants, mais le gouvernement planifiait nos heures de sortie. C’est comme cela pour tout.

Le gouvernement est incapable de faire en sorte que tout le monde ait un travail, mais il organise très scientifiquement et rationnellement la baisse des indemnités chômage et le report de l’âge de départ à la retraite.

Le gouvernement planifie le retour vers le passé, vers la misère et la précarité. Et s’il décidait de faire la guerre et sonnait la mobilisation générale de la jeunesse, eh bien, là encore, il ne laisserait le choix à personne.

Seuls les travailleurs peuvent remettre de l’ordre dans ce chaos : en se battant pour imposer que l’économie et la société soient organisées en fonction des besoins de la population.

Nathalie Arthaud

Le 5 décembre 2022