L’Assemblée nationale est appelée à se prononcer sur la loi Travail de Hollande-Valls-El Khomri.
Depuis près de deux mois, des centaines de milliers de personnes se
sont mobilisées contre ce projet de loi dans une succession de
manifestations, de débrayages, de grèves à travers tout le pays. Le
rejet de ce projet était encore au centre des manifestations du 1er Mai.
Il est partagé par la grande majorité de la population et par la
quasi-totalité de ceux, salariés d’aujourd’hui et de demain, qui en
seront les victimes. Et pour cause : il officialise plusieurs années de
régression sociale.
Le grand patronat n’a pas attendu la loi El Khomri pour licencier,
pour imposer la flexibilité, pour n’embaucher pratiquement qu’en intérim
ou en CDD. Il veut maintenant une loi qui bénisse une pratique déjà
répandue. La législation du travail serait désormais vidée du peu de
substance qu’elle avait pour être remplacée par la loi privée décidée
par le patron dans chaque entreprise.
Alors, oui, pour les salariés, il y avait de quoi réagir ! Nous
n’avons que trop tardé car ce projet de loi n’est que le couronnement
ou, plus exactement, la dernière en date de toutes les mesures
anti-ouvrières que le gouvernement a imposées au fil des ans, tout en
servant la soupe au grand patronat.
Eh bien, malgré l’hostilité évidente du monde du travail sur cette
question, il appartiendra à 577 députés, toutes étiquettes confondues,
de décider si cette loi s’appliquera ou pas.
On nous dit que c’est cela, la démocratie. On nous dit que les
députés représentent le pays tout simplement parce qu’ils ont été élus
il y a quatre ans. Peu importe que ces prétendus représentants, du
président de la République aux députés de la majorité qui vont décider,
aient été élus en disant une chose et en faisant l’inverse. Ils peuvent
se renier, promettre pour se faire élire d’attaquer la finance et passer
leurs cinq ans de mandat à frapper uniquement les salariés en se
mettant à plat ventre devant le grand patronat, c’est quand même la
démocratie. Quelle impudence !
Ce ne sont même pas les députés élus qui décident, en réalité. Il n’y
a qu’à voir toutes les pressions, toutes les manipulations pour faire
rentrer dans le rang même ceux des députés de la majorité qui semblent
un tant soit peu récalcitrants. Il faut dire qu’il n’est pas difficile
de les amener à l’obéissance : leur carrière politique, leurs petits
privilèges en dépendent.
Non, le véritable pouvoir ne leur appartient pas. Il appartient à
ceux qui ne sont pas obligés d’en passer par le Parlement pour avoir
l’oreille du sommet de l’État et du gouvernement. Ceux qui décident, ce
sont ceux de la grande bourgeoisie, qui ont assez de capitaux pour faire
directement la loi dans leurs entreprises et pour contraindre le
pouvoir à exécuter la politique qu’ils veulent. Et ces gens-là, les
Peugeot, Dassault, Bolloré, Arnault, Pinault, ne tiennent pas leur
pouvoir des élections.
Voilà pourquoi tous ceux du monde politique nous mentent qui nous
répètent que, pour avoir un gouvernement qui mène une politique
correspondant aux intérêts de la majorité, il faut bien voter. C’est une
contre-vérité flagrante. Et tous ceux qui prétendent changer les choses
s’ils sont élus occultent leurs trahisons passées ou préparent leurs
trahisons futures.
Le mouvement de protestation qui est engagé depuis deux mois contre
la loi Travail est certes encore limité. Mais il va dans le bon sens. La
seule façon de contrecarrer le pouvoir du grand capital est de lui
opposer la force du monde du travail.
Cette force est immense. Ce sont les travailleurs qui font marcher
toute l’économie, jusques y compris la pompe à profits qui permet aux
actionnaires des grandes entreprises de s’enrichir sans rien faire de
leurs dix doigts.
Du fait de leur nombre et de leur place irremplaçable dans
l’économie, les travailleurs ont le pouvoir d’arrêter le fonctionnement
de cette économie capitaliste, où une petite minorité, la bourgeoisie,
peut s’approprier ce que le travail de millions de personnes fabrique,
crée ou rend utile.
Les travailleurs, en réalité, peuvent même faire mieux : écarter la
bourgeoisie du pouvoir politique, l’exproprier et prendre en main la
direction de l’économie.
Alors, il faut que le mouvement perdure et que de plus en plus de
salariés prennent conscience que l’exploitation, les inégalités sociales
ne sont pas des lois de la nature. Il faut qu’ils prennent conscience
de leur force collective. C’est la seule voie pour pouvoir contrecarrer
la toute-puissance de l’argent.
Le 2 mai 2016
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