Le scandale Weinstein, du nom de ce producteur américain qui imposait un droit de cuissage aux actrices d’Hollywood, a été un électrochoc dans les milieux bourgeois.
Au travers des mouvements #MeToo et #BalanceTonPorc, des milliers de femmes, essentiellement des journalistes, des écrivaines et des cadres, fréquentant ce qui est censé être la fine fleur de la société, ont témoigné des comportements les plus glauques et avilissants.
Certaines trouvent désormais le courage de porter plainte pour viol ou harcèlement sexuel. Que ce soit aux États-Unis et dans les autres pays, la liste des personnalités mises en cause s’allonge donc de semaine en semaine.
En France, il y a ceux qui sont sous le coup d’une enquête comme le ministre du budget Darmanin, ceux qui sont mis en examen et emprisonnés comme le prédicateur Tariq Ramadan et ceux, comme Hulot, qui ne font pas l’objet de plainte actuelle mais qu’un journal a forcé à s’expliquer sur des relations passées.
Certains dénoncent un climat de suspicion généralisée et voient dans les réseaux sociaux un « tribunal révolutionnaire » intolérable. Mais aujourd'hui, en France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon, un viol a lieu toutes les sept minutes et plus de 20 % des femmes se disent victimes de harcèlement au travail. Alors, si la diffamation peut nuire à la carrière publique de quelques-uns, c’est d’abord le silence et l’omerta qui peuvent tuer.
La société recèle une telle épaisseur de crasse misogyne et de préjugés vis-à-vis des femmes, que cela ressort par tous ses pores, que ce soit sous les paillettes et les poses glamour des stars ou dans les hautes sphères politiques et même religieuses.
L’affaire Strauss-Kahn avait déjà montré, en 2011, qu’un directeur du FMI, ex-ministre dit socialiste et potentiel présidentiable, était aussi un prédateur sexuel. L’affaire Baupin avait dévoilé qu’un politicien écologiste, supposé partisan de l’égalité des sexes, harcelait ses propres camarades de parti.
Aucun milieu n’y échappe parce qu’il ne s’agit pas seulement d’éducation et de culture. C’est une question de préjugés et de pouvoir.
Que des actrices mondialement connues, des députées et des journalistes renommées expliquent ne pas avoir osé dénoncer leur agresseur de peur d’être mises au ban de leur profession et de voir leur carrière compromise, en dit long sur la force du pouvoir et de l’argent dans notre société. Et le gouvernement fait toujours mine de croire à l’existence de rapports égalitaires dans l’entreprise !
Les rapports de domination et de pouvoir structurent la société capitaliste. Et le plus déterminant est le rapport de classe, le rapport entre exploités et exploiteurs, celui qui met les salariés à la merci d’un chef, d’un responsable ou d’un patron. Et les femmes qui subissent de plein fouet les bas salaires, la précarité et le chômage en sont les premières victimes.
Et quand on est ouvrière ou simple employée, il faut se débrouiller sans relations dans les médias, dans la police ou la justice. Il faut se battre sans argent, avec le risque de perdre son gagne-pain.
Alors oui, le combat contre les violences sexuelles s’ajoute à ceux que les travailleurs ont à mener dans les entreprises. Il passe par la lutte contre les réflexions et les attitudes sexistes.
Le pire pour les femmes qui se battent contre leurs harceleurs est d’être en butte aux préjugés machistes de leurs camarades de travail. Il faut qu’elles puissent compter sur les hommes pour conquérir leur dignité au travail. De même, les travailleurs doivent pouvoir compter sur les femmes qui composent la moitié de la classe ouvrière pour mener le combat contre l’exploitation.
Il y a deux siècles, le socialiste Fourier expliquait déjà que, dans une société donnée, le degré d’émancipation des femmes est la mesure de l’émancipation générale. Depuis, bien des luttes se sont déroulées.
Alors que la bourgeoisie réservait l’action politique aux seuls mâles, les femmes se sont battues individuellement ou collectivement pour le droit de faire des études, de travailler, de voter et pour le droit à l’avortement. Ces combats ont contribué à faire évoluer les mentalités et il faut les poursuivre.
Mais ils ne suffisent pas à éradiquer les habitudes sexistes et à déraciner les préjugés séculaires parce que ceux-ci sont entretenus par les rapports d’exploitation inscrits dans l’organisation capitaliste.
C’est pourquoi le combat pour l’émancipation des femmes est indissociable de celui pour libérer la société du capitalisme.
Le 12 février 2018
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