Macron avait déclaré, le 15 mars, face à la manifestation des retraités et des personnels des Ehpad : « Je ne sens pas de colère dans le pays ». Eh bien maintenant, il ne peut plus l’ignorer !
La colère, il l’a sentie à l’hôpital de Rouen, où il a été interpellé par des aides-soignantes sur le manque de moyens, la fermeture de lits et de services. Il la voit à l’université, où les assemblées générales rassemblent de plus en plus d’étudiants et d’enseignants contre une sélection qui exclura des facultés les jeunes des milieux les plus populaires. Il sait que nombre d’écoles, de collèges et de lycées sont en ébullition, du fait, là encore, du manque de personnel.
Et même si Macron n’est pas en première ligne, il n’ignore pas la grève des salariés de Carrefour qui a conduit à la fermeture pure et simple de nombreuses grandes surfaces lors du week-end de Pâques, celle des salariés d’Air France. Puis il y a, bien sûr, la grève des cheminots qui continue et devient, pour lui, un véritable problème politique.
Pour toutes ces raisons, Macron a décidé de prendre la parole jeudi prochain lors d’une interview télévisée.
Son intervention sera sans surprise. Alors que les classes les plus riches du pays n’ont jamais été aussi prospères, que les actionnaires sont comblés et que la finance croule sous les milliards, Macron nous parlera de la dette et des déficits publics.
Quand, dans les quartiers bourgeois, on peut dépenser des dizaines de milliers d’euros pour un sac à main, une paire de chaussures ou un voyage, Macron nous expliquera qu’il faut compter le moindre euro mis dans les hôpitaux, dans les écoles ou dans la justice. Et, conseillé par des gens qui ne prennent jamais le métro, le RER ou les TER, Macron peindra un tableau apocalyptique de la SNCF…
Tout cela, pour nous convaincre de la nécessité de « réformer », de « moderniser » et de « remettre en marche » le pays.
Mais, comme pour le code du travail, toutes ses réformes sont synonymes de marche arrière pour les travailleurs. Elles consistent toujours à supprimer des droits sociaux, à rendre les salariés plus malléables et plus facilement licenciables. Et c’est le cas, aussi, de la réforme ferroviaire.
N’en déplaise aux commentateurs de la télévision qui rabâchent que les cheminots n’ont aucune raison de faire grève, ceux-ci savent pourquoi ils se battent. Ils veulent que leurs droits soient respectés, que leurs conditions de travail et leurs salaires ne reculent pas. Comme n’importe quels travailleurs, ils se battent contre la politique de suppressions d’emplois qui rendent de plus en plus dur le travail de ceux qui restent tout en condamnant les autres au chômage.
Ils se battent pour que les jeunes qui seront embauchés demain à la SNCF ne soient pas plus précaires et plus mal payés. Ils se battent parce qu’ils ne veulent pas devenir des pions ballotés au gré des appels d’offres capitalistes.
Le gouvernement se dit déterminé à mettre fin au statut des cheminots. Mais il est incapable d’expliquer en quoi cela aidera les trains à partir et à arriver à l’heure. Parce qu’il n’y a aucun lien !
L’attaque contre le statut des cheminots est une démonstration politique. Macron veut gagner, contre eux, son brevet de réformateur au service du patronat. Il voudrait prouver que rien n’arrêtera son offensive anti-ouvrière. Et s’il l’emporte contre les cheminots, il se servira de sa victoire pour mettre au pas l’ensemble du monde du travail. Car il ne s’arrêtera pas à la SNCF. Le gouvernement s’attèle d’ailleurs déjà aux réformes de l’assurance chômage, des retraites et de la fonction publique qui prévoit 120 000 suppressions d’emplois.
La grève de la SNCF n’est une partie de plaisir pour personne, ni pour les cheminots qui la font ni pour les usagers. Mais les problèmes qu’elle pose ne sont rien en comparaison des reculs qui nous attendent tous si Macron et la bourgeoisie sentent qu’ils ont les mains libres. Il faut donc souhaiter que les cheminots aillent jusqu’au bout de leurs possibilités.
Pour gagner, ils n’ont d’autre choix que de mener une grève déterminée, et il faut les soutenir. Dans cette société capitaliste, les exploités ne se font respecter qu’en montrant leur force. Avoir confiance en ses forces, c’est précisément ce qui manque au monde du travail depuis des décennies.
Eh bien, les cheminots sont en train de retrouver cette confiance ! Cela ne peut qu’être un encouragement pour tous les autres travailleurs. Pour faire reculer le gouvernement, vive la grève des cheminots, vive la solidarité de classe !