Dans une tribune parue dans l’hebdomadaire d’extrême droite Valeurs Actuelles, une vingtaine de généraux à la retraite et plus d'un millier de militaires font planer la menace d’un putsch.
À les entendre, le pays serait menacé par « l’antiracisme haineux », « l’islamisme » et « des hordes de banlieue ». Et de conclure, menaçants : « Si rien n’est entrepris, le laxisme continuera à se répandre inexorablement dans la société, provoquant au final une explosion et l’intervention de nos camarades d’active ».
Pour dissiper toute ambiguïté, les signataires ont pris soin de publier leur appel le 21 avril, exactement 60 ans, jour pour jour, après le putsch d’Alger de 1961 qui avait tenté de remplacer le pouvoir, déjà autoritaire, de De Gaulle par une dictature fasciste.
C’est une provocation d’une frange de l’extrême droite fascisante, et ce n’est ni la première, ni la dernière ! Mais c’est aussi, et surtout, un avertissement pour tous les travailleurs. Car si la tribune a été diffusée par de vieux réacs galonnés et sans armes, elle exprime l’opinion de bien des militaires d’active.
La société est travaillée par la démagogie sécuritaire, raciste et xénophobe de bien des politiciens. La police et l’armée, dressées pour maintenir l’ordre, y sont plus sensibles que quiconque. Et, à la différence des politiciens qui rêvent de faire marcher le pays au pas, mais en sont réduits à faire des discours, l’armée et la police détiennent, elles, les moyens de le faire.
Les militaires et l’armée constituent la force organisée et disciplinée au service de l’ordre établi, c’est-à-dire au service de la domination de la grande bourgeoisie sur toute la société. Ils ont été, dans le passé, le socle de toutes les dictatures, de l’Italie de Mussolini à l’Allemagne nazie en passant par l’Espagne de Franco ou le Portugal de Salazar. Il en va de même aujourd'hui dans de nombreux pays, de l’Algérie à la Birmanie, en passant par l’Égypte. Cette déclaration est là pour nous le rappeler !
Derrière le jeu politicien, les élections et le paravent de la démocratie, il y a un appareil d’État armé, prêt à s’asseoir sur les institutions au nom de la patrie en danger. Tous les militaires sont formés à l’idée qu’ils sont les ultimes garants et piliers de la Nation. Ils sont dressés à l’idée qu’au-delà des péripéties politiciennes, il leur revient de préserver l’ordre en écartant ceux qui ne correspondraient pas à l’idée qu’ils s’en font. Et ne nous y trompons pas, le régime autoritaire qu’ils exigent est dirigé contre tous les travailleurs !
Dans cette période de crise sanitaire, économique et sociale, grosse de colère et de révoltes, la tribune de ces généraux rappelle à la classe capitaliste qu’elle a des chiens de garde prêts à mordre. Elle lui rappelle que, si les politiques sont incapables d’assurer l’ordre, eux le sont ! Pour l’heure, les mots et la salive sont les seules armes qu’ils utilisent. Mais cela peut changer demain. Et ne comptons pas sur le monde politicien pour nous protéger !
À gauche, tout ce que les dirigeants ont trouvé à faire a été de demander à Macron de condamner ces propos factieux. Mais Macron est du même côté de la barricade que ces généraux ! Pour lui, comme pour tous ceux qui dirigent, le danger vient d’abord des travailleurs, des pauvres, des opprimés qui pourraient ne plus accepter la situation qu’on leur impose.
Le gouvernement, par la voix de la ministre des Armées, a tenté de minimiser la chose. Il n’y aurait pas de souci à se faire, puisque l’armée aurait un devoir de « neutralité et de loyauté » vis-à-vis du pouvoir politique ! Comme si ce prétendu devoir avait empêché les coups d’État ! Les militaires sont bien placés pour savoir que le pouvoir appartient à ceux qui sont armés.
Quant à Le Pen, malgré ses multiples professions de foi démocratiques et républicaines et sa stratégie de dédiabolisation, elle a chaleureusement salué la déclaration de ces apprentis factieux et les a appelés à la rejoindre !
Il nous faut prendre conscience du danger qui nous menace. La grande bourgeoisie sait ce qu’elle veut : elle continuera d’imposer son parasitisme malgré la crise et même si cela la conduit à faire reculer le monde du travail des décennies en arrière. Pour cela, elle peut être amenée à s’appuyer sur l’armée ou sur les forces politiques les plus réactionnaires, si ce n’est sur les deux en même temps. Cela doit nous convaincre que notre sort dépend de nous-mêmes. Il nous appartient de nous battre pour sauver nos droits élémentaires, à commencer par celui à l’existence. Nous en avons la force en nous organisant collectivement sur la base de nos intérêts de classe.
Le 26 avril 2021
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